Cher Joseph, mon cher époux
Air : Vous qui désirez sans fin ouïr chanter.
MARIE
Cher Joseph, mon cher époux,
Arrêtons-nous,
Il faut que le roi des cieux
Naisse en ces lieux ;
Je sens qu’il n’est pas besoin
D’aller plus loin,
C’est de mon accouchement
L’heureux moment.
JOSEPH
Bethléem est près d’ici,
Nous y voici ;
Cherchons un petit réduit,
Pour cette nuit,
Ah ! mes soins sont superflus,
Il n’en est plus,
Quoi, le monde pour son Dieu,
N’a point de lieu !
MARIE
Quoi, mon Dieu, dans ce grand jour
De votre amour,
Vous ne trouvez ici-bas,
Que des ingrats,
Vers l’étable que je vois,
Conduisez-moi,
Confions des jours si beaux,
Aux animaux.
JOSEPH, dans l’étable
Quel éclat vient en ces lieux,
Frapper nos yeux.
Qui fait retentir les airs,
De ces concerts ;
J’entends mille et mille voix
Tout à la fois,
Offrir ce jour solennel.
À l’éternel.
MARIE
Ah ! cessez d’être surpris,
C’est pour mon Fils,
Que la bienheureuse cour
Chante en ce jour.
Il est né ce Fils charmant,
Dans ce moment.
Tout annonce la grandeur
Du Créateur.
JOSEPH
Ah ! je suis tout enchanté,
De sa beauté,
Je sens une sainte ardeur,
Naître en mon cœur.
Tous mes vœux dès aujourd’hui
Seront pour lui,
Et qui peut voir tant d’appas,
Et n’aimer pas.
MARIE
Il aime aussi tendrement
Qu’il est charmant.
Il enflamme nos désirs,
Par ses soupirs ;
Le voyant en cet état,
Quel cœur ingrat,
Peut-on sans l’aimer à son tour
Voir tant d’amour.
JOSEPH
Comme fille du Très-Haut
Et sans défaut,
C’est le ciel qui vous a fait,
Ce cœur parfait,
Mais je veux tel que je suis
Si je le puis,
Aimer un enfant si doux,
Autant que vous.
Simon-Joseph PELLEGRIN.
Recueilli dans La grande et belle bible
des Noëls anciens, XVIIe et XVIIIe siècles,
par Henry Poulaille, Éditions Albin Michel, 1950.