Reflet

 

 

Un peu d’eau gît, morne et stagnante,

Au creux étroit de six pavés,

Grisâtre, presque répugnante.

Des cailloux émergent lavés.

 

Un pitoyable destin voue

Flétrie, inutile, celle eau

À se résorber dans la boue,

Elle qui tombe de si haut.

 

« Ma sœur l’eau, dit le saint d’Assise,

Chaste et pure !... » Lui qui parla

Si bien d’elle, qu’il exorcise

L’eau malchanceuse que voilà !

 

... Impatience, une main semble

Des nuages briser le plomb...

Miracle ! à présent l’azur tremble

Dans la flaque, miroir oblong.

 

Elle resplendit. On hésite

À la fouler d’un pied distrait ;

Sa limpidité ressuscite

En qui tant de bleu transparaît.

 

Insensé, l’homme qui dédaigne

Sa vie humble, au sort usuel ;

En elle tout l’infini baigne :

La moindre flaque d’eau peut refléter le ciel !

 

 

 

Marguerite PERROY.

 

Paru dans Les Causeries en 1927.

 

 

 

 

 

 

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