Les hirondelles et les écoliers
Sur le faîte du toit qui couvre notre école
Les hirondelles vont jaser chaque matin,
Couronnant la maison de la gaie auréole
De leur troupe joyeuse au babil argentin.
À nos âpres hivers par l’automne enlevées,
Elles vont, préludant à leur départ prochain,
Préparer sagement leurs récentes couvées
Aux fatigues qu’entraîne un voyage lointain.
Des petits écoliers, ces images fidèles
Bientôt s’éloigneront et quitteront ces lieux ;
Dans vingt pays divers fuiront les hirondelles
Ainsi que ces enfants iront sous d’autres cieux.
De la jeune exilée à l’humeur passagère
Avec le frais printemps nous verrons le retour ;
Elle doit arrivant de la rive étrangère
Au nid qui la vit naître être mère à son tour.
Mais plus d’un exilé de l’école champêtre
Loin d’elle achèvera peut-être son destin,
Pleurant le beau pays où Dieu lui donna l’être
Et l’abri fortuné de son riant matin.
L’hirondelle obéit, l’Éternel qui la mène
Fixe de son exil et le terme et le lieu.
Mais le guide orgueilleux nommé raison humaine
Ne vaut pas cet instinct donné par le bon Dieu.
Éternel, aux enfants ainsi qu’à l’hirondelle,
Donne, s’ils vont au loin chercher des cieux plus doux,
Cet instinct merveilleux à qui l’oiseau fidèle
Doit de trouver ailleurs les biens qu’il eût chez nous.
J. PETIT-SENN.
Paru dans La Tribune lyrique populaire en 1861.