Le trouble
Ah ! laissez-moi bercer mon ineffable rêve,
Je sens d’un autre lin se vêtir ma beauté,
Et la lune est ainsi qu’une averse d’été,
Et la colombe au bord de son nid se soulève...
Il semble que je vis dans un biblique jour,
Mes cheveux sont pareils aux vapeurs du cinname,
C’est l’âme de Sion qui chante dans mon âme,
J’ai brûlé des parfums et respiré l’amour.
J’ai crié vers les bois pour réveiller les roses
Et pour en obtenir le cœur du bien-aimé...
J’ai compris en passant dans le vent enflammé,
Que le désir est mûr sur mes lèvres écloses.
Mon rire était ainsi que du cristal brisé,
J’ai supplié la vie en pleurant sur la terre,
Aux arbres, aux ruisseaux, à l’ombre solitaire,
J’ai demandé tout bas le secret du baiser...
Le printemps regardait se balancer les cloches,
Toute l’odeur de Pâque était sur les chemins,
Les muguets ont loué la blancheur de mes mains,
Et j’ai su que les temps de mes noces sont proches.
Je veux seule, ce soir, sangloter dans l’air doux.
Oh ! c’est trop de bonheur, trop d’ardeur, trop d’alarmes,
Mes yeux sont étonnés de leurs nouvelles larmes,
Vous ne pouvez savoir encore...
Éloignez-vous...
Hélène PICARD, L’Instant éternel.