La jeunesse de Jeanne
Au milieu des senteurs des menthes et des sauges,
Alors qu’elle suivait les côtés des chemins
Ou les sentiers des bois, l’humble fille des Vosges
Rêvait, appréhendant de cruels lendemains.
Les grands bœufs mugissants qu’on menait vers les auges
Regardaient la bergère avec des yeux humains ;
Les rudes sangliers abandonnaient leurs bauges ;
Les loups, aux crocs sanglants, auraient léché ses mains.
Mais Jeanne, doucement, ordonnait aux mésanges
De suspendre leurs voix pour écouter les anges
Qui disaient Orléans, le sacre... et s’envolaient...
Ainsi, par les beaux jours comme par la tempête,
Notre libératrice allait, courbant la tête
Sous le rôle trop grand dont les Cieux l’accablaient.
Marquis de PIMODAN.
Paru dans L’Année des poètes en 1895.