Le bonheur de ce monde
Avoir une maison commode, propre et belle,
Un jardin tapissé d’espaliers odorants,
Des fruits, d’excellent vin, peu de train, peu d’enfants,
Posséder seul sans bruit une femme fidèle.
N’avoir dettes, amour, ni procès, ni querelle,
Ni de partage à faire avecque ses parents,
Se contenter de peu, n’espérer rien des grands,
Régler tous ses desseins sur un juste modèle.
Vivre avecque franchise et sans ambition,
S’adonner sans scrupule à la dévotion,
Dompter ses passions, les rendre obéissantes.
Conserver l’esprit libre et le jugement fort,
Dire son chapelet en cultivant ses entes,
C’est attendre chez soi bien doucement la mort.
Christophe PLANTIN.
Recueilli dans Poètes de la famille du XVIe au XIXe siècle, Casterman, s. d.