Chambre d’hiver
J’ai retrouvé ton pays
le pays qui était le tien, – le mien encore
et notre chambre sous le vent
étroite et de chaux mauve fouettée
le lit en bois de noyer
les draps de fil que tu lissais.
Parfumé de neige et de jacinthe
l’air de l’hiver glisse sous les volets
toujours le même... Je m’endormirai
comme si près de moi je sentais ton haleine
et ton repos semblable au mien.
Je vois la main de la vierge dans son image
surgir du pli du manteau bleu.
Elle n’a pas de couronne et semble couronnée.
De l’autre côté le petit miroir
dans l’ombre qui le clôt recueille ton visage
et le soyeux écoulement
des tresses que tu nouais autour de ton front
Sans rupture dans la nuit
le silence de l’ombre a tout retenu
Et notre vie est comme un fleuve
où le premier secret de l’eau murmure.
Par la seule vertu du souvenir
je t’ai retrouvée dans la chambre d’hiver.
Ma fille entrait avec le jour
Quel instinct la guidait jusqu’à ma porte ?
Elle était l’ange de Noël
qui d’une main heureuse tient la palme
Elle m’a dit : Venez donc voir
les neiges et l’azur de la montagne.
Josep-Sebastià PONS.
Recueilli dans J. S. Pons,
par Yves Rouquette,
Seghers, 1963.