La vraie fraternité
(DIALOGUE)
(Un laboureur, un vigneron et un prêtre.)
Le laboureur.
Je suis laboureur ; je sème et je fauche ; je fais l’abondance, et j’apaise la faim. Ma sueur couvre d’épis la plaine entière.
Le vigneron.
Je suis vigneron ; je mets les plants en ligne ; je les taille et les émonde, et ils font la vigne, source abondante pour tout être humain.
Le prêtre.
Moi, je vais donnant la vie, fortifiant les âmes, et attisant les flammes du véritable amour : unissons-nous, mes frères, et donnons-nous la main.
Le laboureur.
Il est savoureux pour moi, le pain que vous donnez, ô père. Je serais sans vous dans l’abandon.
Le vigneron.
Vous seul donnez au cœur le vin qui le réconforte. Je serais sans vous brûlé de soif.
Le prêtre.
Hors vous, mes amis, qui donc soutient l’autel ? Vous lui donnez le pain et le vin tout ensemble.
Les trois (levant les yeux au ciel).
Seigneur, que votre amour fasse avec nous son office. Nous vous offrons de tout cœur à la fois le pain et le vin. Chacun participe au grand sacrifice, et le mystère divin nous rend frères tous les trois.
Justin PRÉPATX.
Traduit du catalan par Jean Amade.
Recueilli dans Anthologie catalane (1re série : Les poètes roussillonnais),
avec Introduction, Bibliographie, Traduction française et Notes
par Jean Amade, agrégé de l’Université, professeur au Lycée
de Montpellier, 1908.