Rêves défunts
Vos yeux pâles m’ont fait l’aveu silencieux
D’une intime douleur que je croyais bien morte :
Ils ont même pleuré, je crois, vos pâles yeux...
Pourquoi des jours vécus rouvrir ainsi la porte ?
Quand l’âme s’est grisée à regarder les cieux.
Elle doit s’incliner parfois – fût-elle forte –
Au souffle impie, amer, d’un sort capricieux ;
Puis seule, dépérir, agoniser... qu’importe !
Le sort est effronté, profane, sans appel ;
Le monde est égoïste et superficiel,
Et ne s’arrête point aux indicibles peines ;
Mais les peines souvent ramènent le bonheur
Quand on les offre à Dieu, ce vrai consolateur
Des noirs abattements et des fièvres humaines.
A. Adolphe PRIEUR.
Paru dans L’Année des poètes en 1897.