Ignotus
Je ne sais pas qui Tu es. Mais je sais que Tu es
et que Tu allumes les étoiles là-haut
et le feu de la joie dans la tristesse de mes humbles yeux.
Je ne Te vois ni ne Te parle que dans le silence séculaire
des nuits blanches et longues, pendant que mon corps s’éteint
et que mon âme devient une flamme inquiète qui brûle.
Je Te veux et Te crains, timide, anxieux et rebelle...
Et dans toute ma vie
si je Te fuis – regard sans lumière pour ne pas Te voir, ouïe sourde pour ne pas T’écouter –
je sens Ta splendeur qui blesse ma cécité alanguie,
j’entends la rumeur augurale des avirons de Ton bateau
frappant lentement
de leur rythme d’Absolu
l’eau nocturne de ma pensée.
Abgar RENAULT, Inédit.
Recueilli dans Introduction à la poésie ibéro-américaine,
Présentation et traduction par Pierre Darmeangeat
et A.D. Tavares Bastos, Le Livre du Jour, Paris, 1947.