Rêve de printemps
À Madame Marie Chauvet.
Dans l’air embaumé de roses,
Dans le jardin plein de paix,
Sous les rayons bleus et roses,
J’étais seul et je rêvais.
En l’ombre mystérieuse
Des rameaux clairs et pâlis,
Une femme radieuse
M’apparut parmi les lys.
Elle portait une lyre
Et comme un ange des deux
L’extase d’un saint délire
Resplendissait dans ses yeux.
D’une voix sereine et pure
Elle se mit à chanter ;
Et l’âme de la nature
Se penchait pour l’écouter ;
« Viens, je suis la Poésie,
« Incline vers moi ton cœur
« Et tu boiras l’ambroisie
« À l’idéal enchanteur ;
« Je te souris et je t’aime
« Tendrement comme une sœur
« C’est ma volupté suprême
« De consoler la douleur. »
Et rêveur, j’allai vers elle ;
Elle me prit par la main
Et m’emporta sur son aile
Par le céleste chemin.
Et je sentais que mon âme
Brûlant d’un divin amour,
Légère et tremblante flamme,
S’envolait vers le grand jour....
Fernand RICHARD.
Paru dans La Sylphide en 1898.