Sonnet

 

 

Il faut laisser maisons et vergers et jardins,

Vaisselles et vaisseaux que l’artisan burine,

Et chanter son obseque en la façon du Cygne,

Qui chante son trespas sur les bors Maeandrins.

 

C’est fait ! j’ay devidé le cours de mes destins,

J’ay vescu, j’ay rendu mon nom assez insigne ;

Ma plume vole au Ciel, pour estre quelque signe,

Loin des appas mondains qui trompent les plus fins.

 

Heureux qui ne fut onc, plus heureux qui retourne

En rien comme il estoit, plus heureux qui sejourne,

D’homme fait nouvel ange, auprès de Jesus-Christ.

 

Laissant pourrir çà-bas sa despouille de boüe,

Dont le Sort, la Fortune et le Destin se joüe,

Franc des liens du corps pour n’estre qu’un esprit.

 

 

 

Pierre de RONSARD.

 

 

 

 

 

 

 

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