Offrande
Jérusalem, lève-toi, tiens-toi sur les hauteurs,
et vois le bonheur qui vient vers toi,
de la part de ton Dieu.
2e dim. de l’Avent.
Mon Dieu, je Vous offre ma solitude qui sera longue, je le sais,
Ma quotidienne solitude où jalousement Vous seul devrez régner.
Je Vous offre les affections qu’il faudra, dès le seuil, déconcerter,
Ces mains aimantes, ces beaux visages, qu’il s’agira, sans retour, d’écarter.
Seigneur, jusqu’à ce jour si j’ai farouchement gardé ma solitude,
Vous savez que c’était uniquement par souci de libre attitude,
Pour ménager à chaque éventualité toute sa plénitude,
Pour arriver sans entrave au choix, au compagnon, à la route, à l’altitude.
Mais désormais ma solitude humaine, Vous le savez, mon Dieu,
Ne sera plus celle-là d’accumulation, de désirs, mais celle-ci de réticences, d’adieux.
Ce ne sera plus la perpétuelle offrande, le don capricieux,
Mais au temple secret, l’autel d’amour, austère, stable, impérieux.
En expiation de l’autre et des joies retirées en ses séduisantes inconstances,
Je Vous offre, mon Dieu, ma solitude à venir dans sa trame de souffrance,
Je Vous offre ma porte de balcon scellée au-dessus des chaudes présences.
Je Vous offre, mon Dieu, mes jours de tourments, mes nuits de silence.
Remplissez de Vous cette solitude, ces nuits et ces jours.
Élargissez-en à votre cœur infini les mobiles contours.
Que mon cœur n’y soit point perdu, ni mon âme à son tour.
Mais que mes détresses mêmes y grandissent, éperdues de votre amour.
Simone ROUTIER.
Recueilli dans Le choix de Simone Routier
dans l’œuvre de Simone Routier, 1981.