La mort du Christ
Ah ! les femmes, les flammes
Ont fait mourir la nuit ;
J’ai trop apprécié les larmes
Pour penser ailleurs qu’à la nuit.
Ceux qui n’ont pas connu l’enfance
Et ne furent jamais des hommes
Tournent et retournent l’offense
Que leur fit le Dieu fait homme.
Leur visage de glace change
Comme ces lies de couleur,
Où naquit pour eux la douleur
D’aimer leurs ambitions étranges ;
Et les oiseaux les dévisagent
Avec religion,
Car ils sont belliqueux et sages,
Ardents comme une nation.
Mort, Mort, que je vous aime,
Ô mes anges multipliés,
Multipliés comme un blasphème
Auquel toujours je serai lié.
Mais les anges, fondant en larmes,
Couvraient de leurs grands voiles lourds
La maison immense et sans charmes
Où les enfants cherchaient l’amour.
La femme aux jambes rétractiles
Et transparentes dans son lit
S’endormait comme une sibylle
Après avoir poussé un cri.
Paul SABON, mai 1927.
Paru dans le Roseau d’or en 1928.