Source de tous les biens...
Source de tous les biens inépuisable et pure
Maître des hommes et des dieux
Cher auteur des maux que j’endure
Êtes-vous pour jamais disparu de mes yeux ?
Je vous en ai banni moi-même :
D’un indigne soupçon mon cour s’est alarmé.
Cœur ingrat, tu n’avais qu’un feu mal allumé,
Et l’on ne peut vouloir, du moment que l’on aime,
Que ce que veut l’objet aimé.
Dans des bois toujours verts, où d’amour on respire
Aussitôt qu’on est mort d’amour ;
D’amour on y revit, d’amour on y soupire...
J’ai pleuré, j’ai peiné, je soupire et menace
Et perds menaces et soupirs.
Elle ne veut pas voir que de mes déplaisirs
Dépend du monde entier l’heureuse ou triste face,
Et que, si Psyché perd le jour,
Si Psyché n’est à moi, je ne suis plus l’amour.
Oui, je romprai mon arc, je briserai mes flèches,
J’éteindrai jusqu’à mon flambeau.
Je laisserai languir la nature au tombeau.
Hector de SAINT-DENYS GARNEAU, Œuvres,
édition critique établie par Jacques Brault et Benoît Lacroix,
Presses de l’Université de Montréal, 1971.