J’aime parfois songer...
J’AIME parfois songer à quelque église ancienne.
C’est, dans un coin perdu de vieille chrétienté,
Solidement assis sur ses bases chrétiennes,
Un lieu qu’a jusqu’ici le vandale ignoré.
Les murs n’ont rien perdu de leur force romane.
Contre eux n’ont prévalu les enfers ni le temps.
Des saintes profondeurs de leurs pierres émane
Comme un parfum subtil de prière et d’encens.
Et, certains soirs, des voix, à l’heure de complies,
Reviennent ranimer la grande âme des lieux,
Et ces échos dolents d’antiques mélodies
Ont le tragique accent des ultimes adieux.
C’est là que j’aime aller, à l’heure obscure et tendre
Où tout à son silence et son ombre revient,
Où seul avec les mots que le cœur sait entendre,
Le mystère de Dieu dialogue avec le mien.
Félix-Antoine SAVARD, Le bouscueil,
Fides, 1972.