Il est grand
Au splendide Océan, cet incommensurable,
Ajoutez le Désert, cet océan de sable,
Les champs d’or, les monts blancs ;
Fuyez, envolez-vous dans les nuits constellées
Aux nébuleuses étoilées,
D’où l’Éclair jusqu’à nous se traîne cent mille ans !
Entassez les soleils et les planètes rondes,
Et, sur l’entassement des mondes, d’autres mondes ;
Et toujours entassez,
Jusqu’à ce qu’épuisée, haletante, éperdue,
L’Imagination s’arrête confondue :
Alors recommencez !
Joignez les milliards aux milliards de lieues !
Aux atmosphères d’or les atmosphères bleues !
Les univers aux univers !
Et si pour ce travail ta vie, insecte, est brève,
Dis à l’humanité de poursuivre ton rêve :
Au secours, Newtons et Képlers !
Six mille ans, dix mille ans, cent millions d’années,
Calculez, alignez de vos mains acharnées
Et de votre prunelle en feu
Les grossissements fous des chiffres et des mondes.
– Et vous aurez à peine, ô sciences profondes,
Effleuré la frange de Dieu !
Joseph SERRE.
Paru dans L’Année des poètes en 1892.