Résignation
Depuis que l’anathème, à l’aurore du monde
Comme un tonnerre immense a vibré sous les cieux,
Et que l’homme, trompé, morne, baissant les yeux
S’en alla regardant la poussière inféconde
En répétant, tout bas, les paroles de Dieu ;
Depuis, le vrai bonheur s’est enfui comme un rêve ;
La souffrance et la mort frappent, frappent sans trêve,
Et l’on n’entend, partout, qu’un triste et lent adieu !
Moi-même j’ai connu, Seigneur ! bien des alarmes
Et bien des jours mauvais ;
Et les peines parfois m’ont arraché des larmes,
Mais des plaintes, jamais.
J’abaisse sous les coups de l’éternelle offense
Mon front et mon orgueil ;
Et je saurais encore accepter en silence
L’horreur d’un nouveau deuil.
Comme Job, que frappa le démon en sa haine,
J’ai dit dans mon malheur :
« Que votre volonté soit faite, et non la mienne !
Soyez béni, Seigneur ! »
Jules SOTTIAUX.
Paru dans L’Année des poètes en 1891.