La jeune mère italienne
auprès du berceau de son enfant
Parfois, dans Albenga, sur des feuilles de rose,
La jeune Italienne, au pied d’un grand melrose,
Vient bercer son enfant avec des mots si doux
Qu’on le croirait gardé par un ange à genoux ;
Tandis qu’un rossignol, sur la branche élevée,
Enchante, au bord des eaux, sa flottante couvée,
Et que la lune calme, à travers l’arbre en fleur,
Laisse tomber du ciel ses perles de blancheur.
« Dors, mon fils ! dors, mon fils ! ces rameaux, heureux voiles,
« Sans dérober ton front au baiser des étoiles,
« Te protègent... Bercé par les flots murmurants,
« Que ta vie ait encor des flots plus transparents !
« Que chacun de tes jours, harmonieuse fête,
« Ressemble au nid d’oiseaux qui chante sur ta tête,
« Et ne connaisse pas l’orage de douleurs
« Qui se lève sur nous après le mois des fleurs ! »
Et l’oiseau, de ses chants, sur son nid qui sommeille,
Jette aux échos du ciel la sonore merveille ;
Ou, mourant de langueur, de ses accords changés
Traîne en soupirs plaintifs les refrains prolongés.
« Dors, mon enfant ! c’est l’heure où l’on voit, sous le saule
« Étinceler d’amour le ver luisant qui vole.
« Dors ! je t’ai consacré les veilles de mon cœur ;
« La nuit n’a pas de rêve égal à mon bonheur !
« Comme l’enfant Jésus rayonne sur sa mère,
« D’un souris de mon fils tout mon être s’éclaire ;
« C’est mon astre, mon ciel, mon ange le plus beau ;
« L’horizon de ma vie est autour d’un berceau. »
Et l’oiseau, de ses chants, sur son nid qui sommeille,
Jette aux échos du ciel la sonore merveille ;
Ou, mourant de langueur, de ses accords changés
Traîne en soupirs plaintifs les refrains prolongés.
« Dors, mon petit enfant ! l’arbre qui t’environne
« Ouvre toutes ses fleurs dans l’air pour ta couronne !
« L’aurore a des rayons plus doux que ceux du soir.
« Dors ! tes yeux bleus demain s’ouvriront pour me voir ;
« Demain viendra le jour ; mais mon âme en prière
« Dans ton regard aimé cherchera la lumière.
« Silence ! flots légers ; oiseaux, chantez plus bas !
« J’écoute mon enfant, qui ne me parle pas. »
Ainsi, près d’un berceau renfermant tout un monde,
Que son cœur débordé de tant d’amour inonde,
La jeune Italienne a soupiré ces mots,
Doux trésor de bonheur de sa tendresse éclos ;
Mais ce n’est qu’une image incertaine, éphémère,
De l’extase des cieux dans le sein d’une mère.
Alexandre SOUMET.
Recueilli dans
Recueil gradué de poésies françaises,
par Frédéric Caumont, 1847.