Ami, quand l’heure vient

 

 

Ami, quand l’heure vient où tout est consommé,

                Quand la ténèbre en toi s’est déversée,

Qu’ont roulé dans l’abîme doutes et souvenirs,

Qu’ombres et feux fantômes assiègent ta pensée –

                Quand ton cœur n’est plus que soupirs

                Et quand ton œil n’est plus que larmes –

                Ami, lorsque ton âme enténébrée

                A perdu ses ailes de feu

Et que vers le Néant tu sombres avec horreur,

Qui vient pour te sauver ? Quel est l’Ange fidèle

Qui fait la paix en toi et te rend la Beauté,

Qui relève tes ruines et reconstruit l’autel

Où de sa main sacrée il rallume la flamme ?

C’est lui, l’Être suprême ! qui dans la nuit des temps

D’un baiser donna vie aux Séraphins, et qui

                Éveilla à la danse les étoiles !

C’est lui, le Verbe Saint qui dit : Soyez ! aux mondes,

Et dont la force meut sans cesse l’univers !

                Aussi, réjouis-toi, ami, et chante

                Dans la nuit de ton désespoir :

La Nuit est la mère du Jour, et le Chaos

                    Est proche de Dieu.

 

 

 

 

Erik Johan STAGNELIUS.

 

Traduit du suédois par Jean-Clarence Lambert.

 

Recueilli dans Anthologie de la poésie suédoise, Seuil, 1971.