À Mlle Louisa Stappaerts
APRÈS LA LECTURE DE SES PÂQUERETTES
Un jour, le Créateur, en regardant la terre,
Gémit de ne plus voir ni d’amour, ni de foi.
« Eh quoi ! dit Jéhovah, délaissant la prière,
« L’homme se soustrait à ma loi.
« Ingrats ! où retrouver cette divine égide ?
« Quand le monde la perd, la foi remonte aux cieux.
« Mais le Ciel vous pardonne ; à votre terre aride
« Il rendra ce don précieux.
« Pour ranimer vos cœurs il faut un de mes anges,
« Mortels, recueillez-vous ! mon envoyé paraît. »
Et soudain descendit des célestes phalanges
Un chérubin qui préludait.
Ce bon ange, c’est toi, c’est toi, jeune inspirée !
Sans doute à ton berceau, naïve et blonde enfant,
Pendant que tu dormais, le baiser d’une fée
Vint effleurer ton front charmant.
Sans doute qu’à Jésus, le jour de ta naissance,
Gabriel annonça le retour d’un pécheur,
Et qu’en ce jour de fête, à Dieu pour récompense
Il demanda le soin de te doter le cœur.
Certe, il l’a bien doté : tu reçus en partage
Une âme calme et simple, exempte de tout fiel ;
Et ton ange t’apprit le céleste langage
Des esprits et des saints au ciel.
Enlisant tes beaux vers, on croit, on prie, on aime,
Et notre cœur s’épure à ton verbe de feu.
Où donc as-tu puisé cette force suprême ?
Poète, as-tu ravi tes chants au sein de Dieu ?
Il n’est donné qu’à ceux que chérissent les anges
De former sur le luth des sons harmonieux.
On dirait que tes chants des hymnes des archanges
Sont un écho mélodieux.
La foi, l’amour et l’art, pour toi voilà le monde ;
La nature et le ciel, une étoile, une fleur,
Le chant du rossignol, le murmure de l’onde
Éveillent la voix de ton cœur.
Fais-la chanter souvent cette voix de ton âme,
Redis-nous chaque jour tes hymnes gracieux ;
Et la foule attentive à tes accents, ô femme,
Croira qu’un ange chante aux cieux.
Adolphe STAPPERS.
Paru dans le Revue de Liège en 1844.