Attente
Jam hiems transiit...
Le voile immaculé ne couvre plus la terre ;
L’hiver vient de finir, l’hiver plein de mystère,
Où rien ne chante plus, où tout languit, s’endort
Et demeure glacé sous un souffle de mort.
Non, ce n’est plus l’hiver, et pourtant sur la branche
Point de tendre bourgeon et point d’étoile blanche ;
Les oiseaux affairés explorent les buissons,
Mais ils taisent encor leurs plus douces chansons.
Dans les bois rien ne meut, ne murmure ou frissonne,
Sinon les rameaux secs et les feuilles d’automne
Qui gisent sur le sol, derniers restes muets
Jetant sur nos espoirs une ombre de regrets.
Qu’attends-tu pour revivre, ô paisible Nature ?
Hymne qui prend la voix de toute créature,
Qu’attends-tu pour vibrer d’un accord sans pareil ?
Sonneras-tu bientôt, heure du grand réveil
Où tout devient rayon, où tout devient poème,
Où tout dit au Seigneur l’acte d’amour suprême,
Mêlant dans un transport d’hommage solennel
Les splendeurs de la terre et les reflets du ciel ?
Ô puissance cachée et pourtant souveraine,
Ta main forge en secret cette beauté sereine
Qui va se révéler en charmes éclatants.
Ce sera de nouveau la fête du Printemps !
Ainsi dure l’hiver, parfois, pour quelques âmes.
Leur courage affaibli, leur pauvre cœur sans flammes
Semblent prêts à sombrer dans cet isolement,
Comme s’éteint l’étoile au pâle firmament.
Oh ! non, ne cédez pas à la désespérance !
La main de Dieu viendra cueillir votre souffrance
Et changer en bonheur cette heure de péril,
Car les roses de mai naissent des pleurs d’avril !
Marie SYLVIA, Vers le beau,
Institut Jeanne d’Arc, 1924.