Mater amabilis
Par tes immenses mérites,
Ô Sainte Vierge Marie,
Tu nous as fait un enfant,
Qui est pour moi toute vie.
Ce très doux enfantelet,
Dis-je, que tu nous as fait,
Cet immense tout petit,
Donne-le, Mère, en nos bras.
Le serrant et l’embrassant,
Aurons tel contentement !
Or qui veut une autre joie,
Aucune jamais qui soit ?
De votre bel enfançon
Affamés nous sommes tous
Et avec nos pauvres cœurs,
Beaucoup nous le désirons.
Accorde-nous, toi, la grâce,
Que nous le contemplions,
Et que toujours il nous garde
En toute sa sauvegarde.
Ô Sainte Vierge Marie,
Qui dans la crèche le tiens,
Avec ton doux enfançon
Nous vivrons, si nous le donnes.
À qui ne le sait pas prendre,
Sur le sein le poseras,
Qu’il ne puisse dénier
Ta très douce courtoisie.
Nous voyons son enfançon
Gigoter parmi le foin,
Ses bras qu’il a découverts,
Tendre à elle vers son sein.
Elle aussitôt le reborde,
Le mieux qu’elle peut du moins
Et lui met le bout du sein
Dedans sa petite bouche.
Tétait le doux enfançon
Avec ses petites lèvres,
Seule la douce tétine
Il voulait, pas la bouillie.
La serrait avec la bouche,
Car il n’avait pas de dents,
Le joli petit enfant,
Dans sa douce chère bouche.
Se servant de sa main gauche,
Elle berçait l’enfançon
Et par de saintes paroles,
Endormait son cher amour.
Qui ne s’émeut en voyant
Cet enfantelet divin
Dormir, est un grand villain
Et sa vie est misérable.
Les petits anges autour
Sont occupés à danser,
En faisant de douces mines
Et de l’amour bavardant,
Les justes et les pécheurs
Avec amour ils invitent,
Puisque la suprême gloire
Du ciel vers eux s’inclina.
Gardons-nous d’être vilains ;
Préférons la courtoisie,
Allons tous ensemble voir
Jésus. Quand il sommeillait,
La terre, l’air et le ciel
Fleurir, et rire il faisait,
Tant de douceur et de grâce
De son visage émanait.
Ô toi notre humanité,
Comme tu es agrandie !
Avec la divinité
Tu t’es cependant unie.
La sainte Vierge Marie
En reste tout étonnée
Et à nous pauvres pécheurs
Semble qu’elle soit liée.
Jacopone da TODI.
Traduit de l’ombrien par Pierre Barbet.