L’âme...
L’âme naissante est nue et dans l’ombre attardée,
C’est par le lent pouvoir des mots évocateurs
Que les mirages du Désir et de l’Idée
L’enveloppent des plis joyeux de leurs splendeurs.
Plus tard avec la force sourde d’un arôme,
Ou la lueur d’une aube altière à l’horizon,
Les mots nous alanguissent l’âme comme un baume,
Ou baignent des clartés du Vrai notre raison.
Ah ! la phrase d’amour où comme en symphonie
Les vocables mêlés montent d’un jet plus fort
Et s’en vont éveiller en la chair endormie,
L’enfant, joyau d’espoir et fléau de la Mort.
Qu’il te souvienne aussi que les mots sont un Rite
Par quoi l’agneau descend sur un flot d’encens roux,
Car, si l’Esprit parfois en l’ombre nous visite,
Dieu voulût que son verbe habitât parmi nous.
Pierre TURPIN.
Recueilli dans Poètes du Nord 1880-1902 :
Morceaux choisis, par A.-M. Gossez, 1902.