Désolation... Consolation
Pour nos chers défunts.
Il fait bien froid, il neige ! et ce blanc voile tombe
Sur la terre gelée et sur chaque tombeau
Où dorment tous nos morts. La neige sur la tombe
De ceux que nous aimons s’étend comme un rideau.
Est-ce donc un malheur que de dormir sous terre
Où nous a rejeté tout le mal de nos os ?
Où l’on trouve un refuge, à l’ombre du mystère,
Pour les chagrins du cœur en ce lieu de repos ?
Que de fréquents périls avant que d’y descendre,
Dans ce cachot obscur où tout nous dormira,
Sans penser qu’il nous faut un jour devenir cendre,
Dans la trame des jours, qui donc y songera ?
Maître ! aviez-vous pensé en créant tout ce monde,
Que tous vous béniraient et que tous pleureraient
De vous savoir honni sur la terre et sur l’onde,
Aux régions des airs, où combien voleraient ?
Seigneur, ayez pitié ! Dans la grande misère
Où nous sommes tombés depuis la Création,
En souffrant et pleurant dans ce monde éphémère,
Pourquoi craindre la mort dans notre condition ?
Chacun de nous connaît un lot de cimetière
Où nos parents, amis, dorment dans leur cercueil.
Un jour viendra pour nous où la même prière
Confondra tous les cœurs, pleurant le même deuil.
Nous monterons vers Toi, Christ ! en t’aimant sans cesse.
Prends nos esprits, nos cœurs et nos corps pour qu’un jour
Se consume en élans d’une sainte allégresse
Toute notre âme enfin, sous ton souffle d’amour !
Il fait bien froid, il neige ! et ce blanc voile tombe
Sur la terre glacée et sur chaque tombeau.
Regardons sans effroi la plus rigide tombe
Où le rideau divin s’étend comme un drapeau...
Westmount, mars 1934.
ATALA (Léonise Valois).
Recueilli dans : Atala, Fleurs tombées, Beauchemin, 1934.