Niagara
Splendeur de la Nature ! enchantement des yeux !
Frémissement des eaux qui courent vers le gouffre.
Le regard vous contemple, et toute âme en ces lieux,
En elle entend mugir ce qui chante ou qui souffre.
Les flots vont se briser sur l’inflexible roc
Qui repousse toujours leur trop bouillante écume.
Ainsi nos sentiments sont meurtris par le choc
Des rigueurs de la vie et noyés d’amertume.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Les orages des cœurs, les tempêtes des ondes,
Sont donc pour la Nature un ressemblant tribut ;
Dans ce miroir des eaux, combien d’âmes profondes
Retrouvent leur reflet dans l’éternel reflux...
En leur sauvage ardeur, les vagues tourmentées
Sont l’image des cœurs souffrant d’un mal sans nom.
Et la crise morale, étouffant nos pensées,
À la Chute conduit... sans un divin Chaînon.
Seigneur ! sauvez nos cœurs ! Au-dessus de l’abîme,
L’Arc-en-ciel lumineux nous redit vos douceurs,
De la « Cave des Vents » remontons à la cime,
Poussés, lancés vers Vous, ô le Dieu des Grandeurs !
Niagara, 1918.
ATALA (Léonise Valois).
Recueilli dans : Atala, Fleurs tombées, Beauchemin, 1934.