Rabboni !
Au matin du grand jour, prédit par le Seigneur,
Madeleine est venue à l’endroit du mystère
Où le tombeau du Christ a gardé la splendeur
Du Miracle de Vie en sa douce lumière.
Mais le sépulcre vide a fait frémir son cœur,
– « Où donc est le bon Maître ? Et je n’ai pu le suivre
Dans ce départ subit qui me donne frayeur. »
L’aurore en sa beauté n’a plus rien qui l’enivre.
En son âme angoissée, elle ne trouve pas
Où peut bien le porter l’aile de sa victoire,
Est-ce en pays conquis par son noble trépas
Où tous ces rayons d’aube enveloppent sa gloire ?
Elle va, pauvre femme, où la guide l’amour,
Pensive sur la route elle cherche la trace
De Celui qui fit d’elle, en un douloureux jour,
L’Amante idéaliste en lui donnant sa grâce.
Elle marche toujours, mais ne retrouve pas
Le tendre Bien-Aimé que son ardeur implore,
Sait-elle seulement où la mènent ses pas
Et si ses yeux pourront le réclamer encore ?
« L’avez-vous vu ? dit-elle, aux passants du chemin.
Je le cherche partout ! Nulle voix qui réponde
Aux mots de ma détresse et je cherche une main
Pour me conduire à Lui qui m’est tout en ce monde.
« Dites-moi, bon jeune homme, avez-vous vu
Celui Vers qui vont mes soupirs dans ma douleur extrême ?
Il est grand ! Il est beau ! Sur son front le Ciel luit !
Que son puissant regard manque à celle qui l’aime !
Marie ! – Ô Maître ! Vous ! et dans son vif élan
Elle va pour toucher le Sauveur adorable.
– « Noli me tangere. » Faible comme un enfant,
Tombe aux divins genoux la sublime Coupable.
Et la Sainte immortelle, à l’amour débordant,
Qui venait de toucher de Jésus le cœur même,
Sentit vibrer son âme et renaître son sang
Au geste souverain de la Bonté suprême !
Westmount, Pâques 1928.
ATALA (Léonise Valois).
Recueilli dans : Atala, Fleurs tombées, Beauchemin, 1934.