De tout l’hiver, je n’ai pas su...
De tout l’hiver, je n’ai pas su
qu’un tout petit peu de Votre or
était caché au plus touffu
du grand bois mort.
Les mains et le cœur vides,
et sans avoir pensé à rien Vous offrir,
j’entrai dans le bois et trouvai
Votre premier crocus dans le soleil.
Il scintillait, si pur,
parmi la mousse obscure
– seule clarté
dans le bois froid et dénudé –
et quelque chose
que j’avais oublié durant l’hiver entier
se mit de nouveau à couver
en moi comme un tendre brasier.
Je demeurai longtemps ainsi,
heureux et comme uni
à ce petit crocus dans le soleil.
Je devinai soudain
combien intimement vivent les petites choses,
et j’ai dit simplement : « Que c’est beau, mon Dieu,
que c’est beau ! »
Paul VERBRUGGEN, L’hiver ne cède pas.
Recueilli dans Anthologie de la poésie néerlandaise
de Belgique (1830-1966),
choix de textes et traduction par Maurice Carême,
Aubier-Montaigne, 1967.
>>>>>