Rêverie pascalienne

 

            à Alex. et Rob. Gardiner.

 

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    En souvenir d’une causerie sur Pascal.

 

         « Borné dans sa nature, infini dans ses vœux

    L’homme est un dieu tombé qui se souvient des cieux !... »

                                                              (Lamartine.)

 

 

Perdu dans l’infini du temps et de l’espace

Petit être chétif, dis-moi, quelle est la race

            Toi qui penses, pour un instant,

 

Sur cet atome épars au sein de la durée

Dans l’éther tournoyant en masse inexplorée

            Qui se déploie au firmament ?...

 

Dis-moi, quel est ton nom, créature éphémère,

Sur le grain de poussière obscur qu’on nomme terre

            Roseau courbé par tous les vents,

 

Toi qui dans ton orgueil insensé veut connaître

Les lois de l’univers, ses limites, son Maître

            Et ses destins toujours mouvants ?...

 

.  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  

 

Je suis l’homme... je sais ma faiblesse infinie,

La moindre goutte d’eau peul me coûter la vie,

            Le moindre souffle m’écraser,

 

Mon faible esprit, tremblant dans une chair infirme,

Ne voit que la surface, et l’ombre qui s’affirme

            Viendra l’éteindre et le briser...

 

Mais l’Auteur Souverain de la voûte géante

A placé dans mon âme une étincelle ardente

            Noble image de sa grandeur,

 

Plus clair que les soleils, plus vaste que les nues,

Le feu de mon désir perce les étendues

            Ivre d’immuable splendeur,

 

Ma pensée au ciel bleu remontant sans relâche

Poursuit sans se lasser son impossible lâche

            En des travaux toujours divers,

 

Car Dieu mit, sous mon front, la quête du sublime

Et creusa dans mon cœur un insondable abîme

            Plus grand que l’immense univers !...

 

 

 

Georges VERGNAUD.

 

Paru dans Les Causeries en 1927.

 

 

 

 

 

 

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