Humanité
Les soirs crucifiés sur l’horizon, les soirs
Saignent, dans les marais, leurs douleurs et leurs plaies,
Dans les marais, ainsi que de rouges miroirs,
Placés pour refléter le martyre des soirs,
Des soirs crucifiés sur l’horizon, les soirs !
Vous les Jésus, pasteurs qui venez par les plaines
Chercher les troupeaux clairs pour vos clairs abreuvoirs,
Voici monter la mort dans les adieux des soirs,
Jésus, voici saigner les toisons et les haines,
Et voici Golgotha surgir, sous les cieux noirs.
Les soirs crucifiés sur les Golgothas noirs,
Ne sont plus que douleurs et que pleurs et que plaies.
Hélas ! Le temps est loin des candides espoirs.
Et les voici saignants dans les clairs abreuvoirs,
Les soirs, les mornes soirs sur les Golgothas noirs !
Émile VERHAEREN, Les soirs.
Recueilli dans Poèmes chrétiens de Verhaeren,
présentés et commentés par André Mabille de Poncheville,
Duculot, 1968.