Aux têtes blondes

 

 

                         I

 

Lorsque le malin, dès l’aurore,

Le soleil, de ses chauds rayons,

Étincelle, réchauffe et dore

Les champs aux fertiles sillons,

 

Allez voir les plaines fleuries

Barioler leurs corsets verts ;

Voyez naître dans les prairies

La mosaïque aux tons divers,

 

Les marguerites, les jonquilles

Et les rutilants boutons d’or

Vous étalent, petites filles,

Leurs diamants, perles, trésor.

 

À midi, vous ferez des gerbes,

Chers enfants aux roses couleurs ;

Mais, en foulant les hautes herbes,

Craignez le serpent sous les fleurs !...

 

Allez, mes belles têtes blondes,

Vider corbeilles, tabliers,

Et former de joyeuses rondes

Sous les verdoyants peupliers.

 

Petits enfants, votre bel âge

Vous invite sur le gazon :

Dansez, chantez, craignez l’orage

Qui pourrait poindre à l’horizon.

 

Après vos jeux sur la pelouse,

Servons les fruits, le lait, le pain,

Robes, habits, velours ou blouse,

Côte à côte, main dans la main,

 

Et s’il passe auprès de la fête

Un malheureux ayant grand’faim.

Dites-lui : « Viens, ta place est prête,

Viens partager notre festin. »

 

Soulagez toujours la misère...

C’est la loi d’un cœur fraternel :

La charité ! c’est le rosaire

Qui plaît le plus à l’Éternel.

 

 

                         II

 

Puisque la dînette est finie,

Mère, un baiser sur chaque front :

Enfants, la candeur est bénie ;

Sur vous les anges veilleront.

 

C’est bien ! sur la table odorante

Le pauvre a goûté votre miel ;

Il part, et, la tête branlante,

Il se signe en mirant le ciel.

 

 

 

Théodore VÉRON, Les mélodies, 1870.

 

 

 

 

 

 

 

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