La prophétie de la sibylle de Cumes
Le dernier âge viendra, que la Sybille chantait :
Cycle nouveau-né des ans écoulés, cycle parfait.
La Justice reviendra sur la terre avec la Loi
Et le dieu Saturne. Du ciel sacré vois sans effroi
Une race nouvelle. Ô Lucine, ô très chaste esprit,
Hâte la naissance de l’Enfant avec qui finit
Notre âge de fer. L’âge d’or, primitif et si bon,
Du monde reviendra, car le doux règne d’Apollon
Recommencera pour nous, cet âge toujours glorieux
S’inaugure, ô Polion, avec toi, ô dieu gracieux ;
De ton consulat dateront les mois heureux, prospères ;
Sous tes auspices, l’Enfant effacera pour ses frères
Tous les crimes, affranchissant le monde de la peur ;
Avec les dieux et les héros, comme les dieux du cœur,
Il aura un commerce familier, et régnera
Sur le monde, et l’esprit de son Père gouvernera.
Pour toi, cher Enfant, la terre donnera sans culture
Ses dons précoces : la guirlande de lierre si pure,
L’acanthe riant, et toutes les fleurs qui croissent en reines ;
Des chèvres libres nous sucerons les mamelles pleines,
Les troupeaux ne craindront plus l’attaque du lion fier,
La terre te bercera, et délicieux sera l’air,
Les serpents venimeux mourront, et l’herbe dangereuse
Se fanera sur ton chemin, sous ta main si gracieuse.
Quand plus tard, avec l’âge, l’Enfant divin connaîtra
Les grandes gloires par lesquelles sa race brilla,
Quand il saura ce que l’honneur veut dire, alors les plaines
Resplendiront de la récolte des fruits et des graines,
Le vin brillant coulera de la grappe ensoleillée,
Le chêne donnera un miel plus doux que la rosée.
VIRGILE.
Traduit par sir Tollemache Sinclair.