Méditationnette
PETITS oiseaux des cieux, quand j’ouvre ma fenêtre,
Alors que l’astre roi commence de paraître
Et que les saphirs bleus fondent à l’horizon ;
Pourquoi ces chants joyeux sortis du vert gazon,
Comme mille parfums qui montent de la terre ?
Dites-moi : chantez-vous les couplets de l’amour,
Ou bien saluez-vous de votre voix légère
Le plaisir de la vie ou le bonheur d’un jour ?
Petits oiseaux des cieux, quand la nuit dans ses voiles
A drapé la campagne et piqué des étoiles
Au fond du toit d’azur ; dehors je viens rêver
Et chercher un repos que je ne puis trouver :
Alors pourquoi ne plus troubler le calme immense
Qui pèse sur les monts et qui plane en tout lieu ?
Dites-moi : dans vos nids priez-vous en silence
Et chantez-vous tout bas un hymne au Seigneur Dieu ?
Petits oiseaux des cieux, oui vous chantez l’aurore
Et la vie et l’amour et le soleil qui dore
De ses rayons pourprés les épis des guérets ;
Et le soir vous priez cachés dans les bosquets :
Comme si vous aviez des tendresses secrètes
Pour les larmes du cœur que lien ne peut calmer.
Car Dieu vous a créés semblables aux poètes
Et vous fit pour prier, pour chanter, pour aimer.
Tancrède de VIRIEU, Pluie d’Étoiles.
Paru dans La Sylphide en 1897.