Le rêve de Louise
C’était un soir charmant de roses,
De roses d’or au bord des prés.
Le vent prenait des parfums roses
À leurs petits cœurs empourprés.
Et dans le vallon solitaire,
La lune d’une nuit d’été
Laissait tomber avec mystère
Sa douce et tranquille clarté !
« D’où viens-tu donc, petite fille,
Au bord du ruisseau transparent ? »
Disaient les fleurs sous la charmille
À chaque léger coup de vent.
« Je viens de là-bas, dans la plaine,
Dit-elle de sa claire voix
C’est là qu’habite ma marraine
À la maison qui touche au bois !... »
« D’où viens-tu donc si tard, Louise »,
Dit la chouette en ricanant.
« Bonsoir, bonsoir », faisait la brise,
Qui la caressait en passant.
« Mais prends garde, petite fille,
De rencontrer là-bas, là-bas,
La fée à la blanche mantille,
La petite fée aux lilas ! »
Au clair de lune tourbillonne
Un feu follet. Louise a peur.
« Où vas-tu si tard, ma mignonne,
Dit une voix dans la vapeur,
Vois ma cousine Fée aux roses,
Moi je suis la Fée aux lilas.
Si tu veux voir de belles choses,
Vers la forêt, suis-nous là-bas ! »
Et sur le carrosse magique
Elles la prirent à l’instant,
La nuit devenait magnifique
Aux feux roses du ver luisant.
Parfois voltigeaient des phalènes,
On entendait un tendre accord
Et les vents enflaient leurs haleines
Pour pousser le carrosse d’or !
Sur des pelouses enchantées,
Dans une magique clarté,
« Descend, descend », disent les fées.
Le carrosse s’est arrêté.
Elle descend et dans les herbes
Faites de paillettes d’argent,
Elle n’aperçoit que superbes
Colliers d’or et de diamant !...
Perles, bagues et pierreries,
Puis bracelets d’argent massif !
Devant ces mille féeries,
Elle resta le cœur craintif.
Tout, à ses yeux, transformé, brille,
Elle est dans un palais de roi.
« Choisis, choisis, petite fille.
Tout ce qui te plaît est pour toi !... »
Elle prend colliers et couronnes,
Broches de cristal, velours d’or.
« Mesdames, vous êtes bien bonnes
Dit-elle, devant son trésor,
Merci, merci, mes belles fées »,
Répète-t-elle en les quittant.
Et des demeures enchantées,
Elle s’éloigne en souriant.
Puis tout à coup, étrange chose,
Les richesses perdent soudain
De leur éclat comme une rose
Qui se flétrit en un matin.
Que se passe-t-il, ô miracle,
Tout se transforme, disparaît.
Elle court vite et sans obstacle,
Traverse campagne et forêt.
Elle vole et vole sans trêve,
En un clin d’œil, c’est le réveil.
« Oh ! maman, quel étrange rêve
J’ai fait, dit-elle, en mon sommeil...
Les gentilles petites fées,
Quels trésors elles m’ont promis !
J’ai vu leurs richesses dorées,
Et puis elles m’ont tout repris. »
S. de FRESSE-MINERVE.