Le savant

 

 

Je demandais un jour à un savant illustre

Comment est la face de la lune opposée à la terre ?

– Noble dame ! je n’en sais rien (fut sa réponse).

– Dans l’espace céleste qu’elle parcourt, derrière elle

Des millions d’étoiles fourmillent,

Demeures semblables à nos régions ;

Y a-t-il là des êtres humains ?

– Je ne puis les sonder et répondre.

– Soit ! mais quand avec le corps qui l’enveloppe,

Nous disparaissons dans le sein de la tombe,

Notre âme reste libre, n’est-ce pas ?

Et va d’étoile en étoile

Comprenant parfaitement toute chose,

Jusqu’au dernier molécule de l’immensité ?

– Hélas ! je ne puis rien répondre à cette question.

– Mais, du moins dites-moi, dans l’œuvre du Créateur

Quel est le monde supérieur à tous par sa beauté ?

N’y a-t-il que ce que je vois de mes yeux ?

– Ma douleur est qu’il n’y a rien de certain à ce sujet.

– Plaisantez-vous, Seigneur ? Cependant la renommée

Rend hommage à votre génie, et de vos écrits

Elle admire l’extérieur comme une œuvre de haute sagesse.

À quoi donc sert la science ?

– À ce que je puisse vous dire ceci :

                        JE NE SAIS PAS.

 

 

 

A. GREGUSS.

 

Paru dans Durendal en 1895.

 

 

 

 

 

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