L’arbre de Noël

 

 

Il dort, il dort, couché là comme un comte...

Oh ! oui, dors bien, cher amour, car j’y compte...

Que le bon Dieu maintienne un doux sommeil

Sur les yeux bleus de mon enfant vermeil.

 

Ne bouge pas, ne bouge pas ; ta mère,

Sans plus savoir si sa vie est amère,

Va doucement chercher l’arbre apprêté,

Pour ton Noël, dans la chambre à côté.

 

Que vais-je y pendre ? une petite chèvre,

Un bon gâteau qui fondra sur ta lèvre ;

Ce petit bœuf étonné, puis enfin

Ces belles fleurs... le tout de sucre fin.

 

Cœur maternel, assez de friandise...

Il en faut être avare, quoi qu’on dise.

Sur le bon Dieu modelons-nous toujours :

Vous sert-il, lui, du gâteau tous les jours ?

 

Sur cette branche il faudra que j’attache

Ces pommes qui n’ont pas la moindre tache :

Quand en vit-on, d’un air si provoquant,

Sourire à ceux qui les regardent... quand ?

 

Oh ! quel plaisir cela fait, une pomme

Qui vous sourit... qu’un épicier, qu’un homme,

Essaie un peu d’en faire autant... merci !

C’est le bon bien seul qui travaille ainsi.

 

Que mettre encor sur cet arbre qui plie,

Pour que ma tâche à moi soit accomplie ?

Ce beau mouchoir aux tranchantes couleurs...

Enfant, que Dieu te préserve des pleurs.

 

Et puis encor ?... ce livre plein d’images,

Où l’on a peint en rouge les rois mages,

Avec un choix de belles oraisons,

Correspondant à toutes les saisons.

 

Bon ; maintenant, c’est bien tout, il me semble ;

Voyons à quoi de loin cela ressemble...

Tiens, sacristie, il faut encore ici,

Une verge... ah ! la voici, la voici...

 

Ce n’est pas là ce que le plus il aime ;

Tant pis, ma foi, car c’est bon tout de même,

Si tôt qu’on sait l’administrer à point ;

D’ailleurs, sois sage, et tu ne l’auras point.

 

Hors ledit cas, il faudra t’y soumettre ;

Oui, mais ta mère est capable de mettre

De beaux rubans autour, pour velouter

Les coups, si rien ne peut t’en exempter.

 

L’arbre est fini... comme il a bonne mine !

Que le grand jour à présent l’illumine,

Et pour ce drôle ingrat et stupéfait,

L’Enfant-Jésus, tout seul aura tout fait.

 

Tu prendras tout sans savoir qui l’apporte,

Et sans me dire un seul merci... n’importe ;

Qu’il te procure un peu de doux émoi,

Et j’en serai déjà bien fière, moi.

 

Bon Dieu, voilà le crieur ; minuit tinte...

Chaque lumière à la fin s’est éteinte.

Comme le temps passe rapidement

Quand le cœur a trouvé son aliment.

 

Que Dieu te garde, enfant ; voici venue

L’heure où Jésus naît sur la paille nue,

Par un grand froid dont un bœuf le défend...

Sois aussi bon que lui, mon cher enfant.

 

 

 

Jean-Pierre HEBEL.

 

Traduit de l’allemand par Max Buchon.

 

 

 

 

 

 

 

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