La leçon de la fleur
« Prends garde ! éloigne-toi de cette fleur que j’aime ;
Si tu me l’effeuillais j’en aurais du chagrin,
Et puis mon cher petit Paulin,
Tu pourrais te piquer toi-même. »
Ainsi parlait de loin la mère avec douceur ;
Elle brodait sous la charmille ;
Mais laissant bien souvent s’arrêter son aiguille,
Pour surveiller l’enfant du regard et du cœur.
Paulin disait tout bas : « La chose est-elle vraie ?
Une fleur me piquer, c’est fort !
Si c’était une abeille encor.
Je ne suis pas un marmot qu’on effraie,
Et je vais essayer d’abord. »
Or, la fraîche fleur purpurine
Se balançait au bout d’un rameau d’églantier.
Ce qu’il advint, on le devine :
En s’élançant pour le faire plier,
L’enfant déchira son visage
Aux longs piquants cachés sous le feuillage...
Il ne jeta pas un seul cri,
Par orgueil, espérant cacher son aventure ;
Mais comment cacher sa figure,
Où l’églantier avait écrit
« Qu’il s’agisse ou non d’églantine
La désobéissance a toujours une épine ! »
Sophie HUË.
Recueilli dans Lecture à haute voix,
par M. V. Delahaye, Beauchemin, 1896.