Jupiter et la brebis
La brebis fit un jour demander audience
Au souverain Maître des dieux.
Jupiter, avec bienveillance
Chargea son messager de l’introduire aux cieux.
« Approche, ma petite... encor... Pourquoi ces larmes ?
– Au jour de la création,
Vous avez oublié de me donner des armes
Pour ma conservation.
– Je puis, par ma toute-puissance
Réparer cet oubli. Voyons ! pour ta défense,
Veux-tu que je donne à ta dent
Le venin mortel du serpent ?
Veux-tu que je donne à ta patte
La griffe du lion ou celle de la chatte ?
Veux-tu que ma divinité
Te donne la férocité
Du loup, de l’ours, de la panthère,
Du tigre ?... Réponds-moi, ma chère,
Parle sans crainte et sans émotion.
– Ne pourrais-je, ô Jupiter, défendre ma toison
Contre mes ennemis sans leur nuire moi-même ?
– Cela n’est pas, ma fille, en mon pouvoir suprême.
– Ô souverain maître des dieux
Et des hommes et du tonnerre !
S’il n’en peut-être autrement, j’aime mieux
Souffrir le mal que de le faire.
Fréderic JACQUIER.