Les oiseaux de Nazareth
On conte, dans cet Évangile
D'une douce sérénité,
Que Jésus, un matin d'été,
De ses doigts, pétrit de l'argile,
Et que, loin des autres enfants
Qui s'amusaient comme à leur âge,
Il en fit sortir, sous l'ombrage,
Tout un groupe d'oiseaux vivants ;
Puis vers la riante vallée,
Et l'azur pur de Nazareth,
Joyeux, il leur montra l'attrait
Des cieux, pour prendre leur volée.
Mais Joseph, incrédule encor
Aux œuvres d'une âme divine,
Sans la foi qui fait qu'on devine,
Doutait surtout de leur essor.
Il dit à Jésus : – Si l'argile
Vit et s'anime sous tes doigts,
Je veux le croire, mais je dois
Y forcer mon âme fragile,
Et même, encore que le feu
Qui rayonne en toi me captive,
En ma conscience craintive,
J'ai peur que tu ne tentes Dieu. –
Et Jésus dit : – Non, rien n'arrête
L'essor de mes pensers divins,
Et mon âme, loin des bruits vains,
Pour les faire vivre, s'apprête ;
Et, tels qu'à des oiseaux, mon front
S'emplit de vivantes pensées,
Qui bientôt, vives et pressées,
Sur le monde, s'envoleront. –
Puis, aux doux êtres, qu'accélèrent
Les frais zéphyrs dans le ciel bleu,
Il dit : – Allez ! montez vers Dieu ! –
Et les gais oiseaux s'envolèrent.
Et ceci montre, en vérité,
Dans une douce parabole,
Que le jour point dans tout symbole
Où l'âme met de la clarté,
Et qu'il faut, vives et pressées,
Vers un idéal toujours prêt,
Comme aux oiseaux de Nazareth,
Donner la vie à ses pensées.
Émile MARIOTTE.