L’ange et l’enfant

 

 

Un ange au radieux visage

Penché sur le bord d’un berceau,

Semblait contempler son image

Comme dans l’onde d’un ruisseau.

 

« Charmant enfant qui me ressemble,

Disait-il, oh ! viens avec moi !

Viens, nous serons heureux ensemble,

La terre est indigne de toi.

 

« Là, jamais entière allégresse :

L’âme y souffre de ses plaisirs,

Les cris de joie ont leur tristesse,

Et les voluptés leurs soupirs.

 

« La crainte est de toutes les fêtes :

Jamais un jour calme et serein

Du choc ténébreux des tempêtes

N’a garanti le lendemain.

 

« Eh quoi ! les chagrins, les alarmes

Viendraient troubler ce front si pur !

Et par l’amertume des larmes

Se terniraient ces yeux d’azur !

 

« Non, non, dans les champs de l’espace

Avec moi tu vas t’envoler ;

La Providence te fait grâce

Des jours que tu devais couler.

 

« Que personne dans ta demeure

N’obscurcisse ses vêtements,

Qu’on accueille ta dernière heure

Ainsi que tes premiers moments.

 

« Que les fronts y soient sans nuage,

Que rien n’y révèle un tombeau.

Quand on est pur comme à ton âge,

Le dernier jour est le plus beau. »

 

Et secouant ses blanches ailes,

L’ange, à ces mots, a pris l’essor

Vers les demeures éternelles...

Pauvre mère !... ton fils est mort !

 

 

 

Jean REBOUL.

 

Recueilli dans Poètes de la famille du XVIe au XIXe siècle, Casterman, s. d.

 

 

 

 

 

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