La bonne dame

 

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

 

Jean-Marie ROUGÉ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

De tradition ancienne, le 15 Août est jour de fête c’est la Bonne Dame d’Août.

Le Folklore le rappelle, il y a « la Bonne Dame de mars », quand les noisetiers montrent leurs chatons, et « la Bonne Dame de Septembre » quand a tout fruit est bon à prendre ».

Mais, dit une légende tourangelle, celle du 15 Août, c’est la Bonne Dame des Anges dont voici le récit :

Au vallon de Ligueil où passe un ruisseau rapide s’élevait un petit oratoire. C’était une vieille chapelle où de nombreuses générations de paysans dormaient dans le grand Topos sous des dalles de pierres après avoir été, dans ce saint lieu, baptisés et mariés...

Une statue de la Vierge, dans une niche, semblait veiller au seuil de la sainte maison, mais au temps de la Révolution, la statue fut volée et la chapelle à demi brûlée.

Du village voisin, personne n’avait profané le sanctuaire, mais tout le monde s’écartait de la chapelle qu’on disait hantée par des esprits.

Chaque nuit, en effet, les ruines resplendissaient d’une lumière éclatante et l’on y avait cru voir la statue de Notre-Dame qui « s’en revenait dans son église ».

La Bonne Rame, en la splendeur d’un rayonnement qui l’entourait, n’était plus une statue de pierre inerte et de forme sans beauté, c’était une belle dame, grande et bien vêtue, qui s’asseyait dans la ruine.

La cloche de la chapelle, don des anciens seigneurs du lieu, se replaçait d’elle-même dans son campanile dénudé. Et la cloche sonnait doucement... Alors, levant les pierres qui dans l’église couvraient les tombes, les anciens du village, trépassés depuis des ans, apparaissaient.

On les voyait avec leurs habits d’autrefois, ceux. des temps lointains, femmes à haute coiffe, paysans vêtus de bure..., puis se montraient les gentes bergères et les fiers laboureurs endormis dans la paix de la mort.

À la nuitée, la Bonne Dame et les ombres animées réveillaient l’église détruite, mais au petit jour, il n’y avait plus que la ruine, et l’aurore la caressait d’une lueur rose...

Cependant les temps ayant changé, quelqu’un rebâtit l’oratoire ; et quand tout fut terminé, quand le clocher s’éleva et que, enclos de murs, l’édifice nouveau se montra tout blanc, tout neuf, au seuil de la porte, on vit la vieille statue de la Bonne Dame, apportée, croit-on, par des anges, et c’est pourquoi la petite chapelle se nomme « la Bonne Dame des Anges » où l’on vient prier, chaque année, le 15 Août.

 

 

 

 

Jean-Marie ROUGÉ, Histoires du jardin

de la France, Mame, 1943.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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