Dialogue de saint Joseph avec l’hôte

 

 

                                            SAINT JOSEPH

 

Hoù ! De la maison ! Maître, maîtresse,

Valet, chambrière, céans n’y a-t-il personne ?

J’ai déjà frappé assez de fois,

Et personne ne vient ! Quelle rudesse !

 

                                                   L’HÔTE

 

Je me suis déjà levé trois fois ;

Si cela dure, je ne dormirai guère.

Qui frappe en bas ? Qu’est tout cela ?

Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ? Que faut-il faire ?

 

                                            SAINT JOSEPH

 

Mon bon ami, prenez la peine

De descendre un peu ici-bas :

Voudriez-vous loger dans votre maison

Moi seulement avec ma femme ?

 

                                                   L’HÔTE

 

Vous autres, vous êtes des trouble-repos ;

Vous êtes de ces coureurs de chemins

Qui ne songez qu’à faire le mal.

Adieu ! Ma porte est fermée

 

                                            SAINT JOSEPH

 

Nazareth est notre patrie ;

Je ne suis pas tel que vous le croyez :

Je suis menuisier, je m’appelle Joseph,

Ma femme s’appelle Marie.

 

                                                   L’HÔTE

 

Céans il y a assez de gens, je ne veux plus personne :

Dieu vous donne une meilleure fortune !

Si vous me croyez, vous demanderez

Où est le logis de la Lune.

 

                                            SAINT JOSEPH

 

Abritez-nous, quoi que cela nous coûte !

Logez-nous dans le galetas ;

Nous vous payerons notre repas

Comme si nous étions à table d’hôte.

 

                                                   L’HÔTE

 

Votre souper sera mal cuit ;

Je crois que vous ferez mauvaise chère ;

Car, pour sûr, cette nuit,

Vous vous logerez à la rue.

 

                                            SAINT JOSEPH

 

Ne nous traitez pas ainsi !

Hélas ! Voyez le temps qu’il fait !

Ouvrez-nous ! Si vous tardez un peu plus,

Vous nous trouverez morts à la porte !

 

                                                   L’HÔTE

 

Votre femme me fait pitié,

Et me rend un peu plus affable :

Je vous logerai par charité

Dans une petite et mauvaise étable.

 

 

 

SABOLY.

 

Traduit de l’occitan par Paul Souchon.

 

Recueilli dans Anthologie de la poésie occitane,

choix, traduction et commentaires

par André Berry, Librairie Stock, 1961.

 

 

 

 

 

 

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